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Pourquoi le Chiapas ?

 

 

Nous avons connu Hélène d’origine suisse, à l’occasion d’un forum sur les peuples racines à Strasbourg en 2018. Nous avions participé à un atelier d’une heure sur un rituel Maya, qu’Herlinda, une jeune femme maya guatémaltèque, animait conjointement.

 

 


Hélène, en tant que traductrice, accompagnait Herlinda qui était venue présenter à ce forum les actions entreprises par sa communauté au Guatémala . Cette communauté est soutenue par l’association Madre Tierra créé par Hélène et Julio.

Nous avions échangé nos adresses. Et une année plus tard, nous voici arrivés à San Cristobal après une heure de minibus « collectivo » depuis l’aéroport de Tuxtla. C’est comme si on retrouvait une amie de longue date, le courant passe aussitôt ! Nous ferons connaissance de son mari Julio quelques jours plus tard, quand il sera de retour . Et il en sera de même!

Le Chiapas, cœur indien du Mexique

Le Chiapas est un État au sud du Mexique jouxtant le Guatémala et le Bélize.


Magnifique région mi-montagneuse à San Cristobal avec ses forêts de pins et mi-tropicale vers Palenque avec sa jungle exubérante.

Cette région a une identité très marquée car elle est peuplée de nombreuses communautés indigènes. Les mexicains parlant une langue amérindienne, représentent à peine 5% de la population du Mexique (128 millions) . Au Chiapas, les indigènes ou peuples racines, sont plus de 20% (2 millions). Ce sont pour la plupart des descendants des Mayas. Les plus importants en nombre sont les ethnies Tzeltales, Tzotziles, Choles et Zoques. Les Zoques sont d’origine aztèque. Chaque ethnie parle sa propre langue et un grand nombre ne parle pas l’espagnol

Le coronavirus au Chiapas

Nous avons pris un avion pour nous déplacer de Cancun, dans le Yucatan jusqu’à  Tuxtla, capitale de l’Etat du Chiapas. A l’arrivée à l’aéroport, les policiers nous donnent du gel pour se laver les mains et chacun est testé au niveau température. Nous devons remplir un questionnaire sanitaire avec une adresse, Il y a également beaucoup de grandes affiches de prévention sur la conduite à observer aux niveau hygiène. Nous prenons ensuite un collectivo, mini bus dans lequel s’entassent une quinzaine de passagers. Nous sommes les seuls à porter le masque.Il fait nuit, nous passons de la plaine aux montagnes, beaucoup de virages et une heure plus tard, nous sommes au coeur de San Cristobal. Un dernier taxi nous conduit chez Hélène et Julio.

 

San Cristobal

Cette ville est la plus vieille cité espagnole du Chiapas. Elle a été fondée en 1528 et a été rebaptisée en l’honneur de l’évêque missionnaire Bartolomé de Las  Casas, défenseur des amérindiens. La ville ( 160 000 habitants) est entourée de hautes collines, posée comme dans un écrin. Cela nous rappelle la géographie de Lhassa, en moins haut bien sûr , ville entourée des montagnes de l’Himalaya.

Nous avons passé les premiers jours de notre séjour à visiter la ville de Saint Cristobal. C’est une ville coloniale avec beaucoup de charme. Les constructions sont basses et colorées, ce que nous adorons. Beaucoup d’églises aux portes closes (prévention coronavirus) et petites places, les Zócalos.

Comme toutes les villes espagnoles, les rues sont parallèles et forme des quartiers carrés. On ressent l’effet du coronana virus, car il n’y a pas autant de monde que d’habitude. Et surtout, il n’y a presque plus de touristes.

San Cristobal, ville cosmopolite…

San Cristobal est assez cosmopolite, entre des étrangers installés à demeure, des routards, certains venus participer à des projets humanitaires, des touristes mexicains et des Indiens tzotziles qui viennent  vendre leurs produits au marché. San Cristobal attire également beaucoup de personnes en recherche de spiritualité, il y a beaucoup de possibilités de méditation, yoga, retraites chamaniques, voyages avec l’ayahuasca…

Mais depuis une semaine déjà, le gouvernement mexicain a commencé à inciter ses citoyens à rester à la maison. Les sites touristiques commencent à fermer, les restaurants et boutiques destinés aux touristes également. C’est aussi pour cela que nous étions pressés d’arriver au Chiapas, de peur qu’il n’y ait plus de transports à l’intérieur du pays. C’est déjà le cas au Guatémala depuis une semaine.

 

Ici le climat est très différent. Nous avons quitté les couleurs bleues de la mer des Caraïbes, les plages ainsi que la chaleur du soleil. Nous sommes perchés à 2200 m d’altitude, ce qui procure une température très agréable, un peu similaire à notre été français. Sauf que la nuit,  la température peut baisser jusqu’à 8°. Mais pas de problème, nous avons des couvertures et nous sommes superbement bien installés avec tout le confort d’une maison de chez nous.

 

 

 

 

 

Beaucoup de fresques peintes sur les façades des maisons…

 

La cathédrale

Nous ne pouvons voir que la façade. L’accès à l’intérieur n’est désormais plus possible. Construite en 1528, rebâtie en 1680 dans un style baroque indigène. Assez massive, égayée par sa façade jaune aux décors floraux.


Sur la place de la cathédrale, nous croisons encore des vendeusesambulantes d’origine Chamula. Elles sont facilement reconnaissables à leur jupe de poils noirs de mouton. L’épaisseur de la doudoune de poils est un signe de richesse…les Chamula sont une communauté relativement riche qui vit à 10 km de Saint Cristóbal; ils ont un sens du commerce assez prononcé, gère le trafic des collectivos, petits bus urbains. Ce qui leur permet de pouvoir acheter là jupe traditionnelle à 7000 pesos soit 350€ quand même…Nous en profitons pour faire le plein de petits bracelets tressés multicolores; nous pourrons en offrir autour de nous et surtout je vais pouvoir en envoyer aux élèves de l’école de Schaffhouse, avec qui je suis restée en contact …une manière de leur faire un clin d’œil mexicain!

 

 

 

De manière générale, nous avons très peu de photos des indiens car ils n’aiment pas qu’on les prenne en photo.

Marché de l’artisanat

Il se trouve au pied du Temple de San Domingo: très belle façade du temple avec des sculptures de saints, chimères, sirènes et lions .

 

 

A nouveau, nous faisons quelques emplettes pour ramener des souvenirs, en pensant que probablement, le confinement allait bientôt arriver et qu’ensuite ce ne serait plus possible. Tout est extrêmement coloré : tissus, pompons, couvertures… Pas mal de poteries de jaguar, animal sacré par excellence pour les mayas et des bijoux en ambre à profusion (mine locale Simojovel à proximité de San Cristobal). Ici l’ambre provient d’une légumineuse à la différence de l’ambre de Baltique issue de conifères. 

 

Gran Mercado: vaste marché très coloré

Le Gran Mercado est fréquenté par les indiens de toute la région. On y trouve des légumes, fruits, fleurs, haricots secs, condiments, chiles , volailles, vêtements, tortilleras….

 

 Iglesia San Cristóbal , ça grimpe bien !

 

 

 

« Sal si puede » –  « Sors si tu peux! »

Quartier tout en couleurs sur un flanc de la montagne de la ville …j’aurais aimé m’y promener pour le voir de plus près,  mais nos amis nous le déconseillent vivement. Il s’agit d’un quartier trés  chaud de la ville, où les gangs  et trafics de drogue sévissent.  Ce sont les autorités de la ville qui ont fait peindre les murs des maisons pour que ce quartier visible à l’entrée de la ville ait meilleure allure.

 

Autres photos au détour des rues …

Le pays des coccinelles,  ma voiture préférée, surtout l’ancien modèle. Elle est très populaire au Mexique, surtout dans sa version la plus ancienne. On l’appelle « El Bocho » . Jusqu’en 2019, Volkswagen fabriquait à Pueblo  les Coccinelles qu’il exportait dans le monde.

 

 

 

 

Instrument traditionnel mexicain: la Marimba aux allures de balafon africain

 

Beaucoup de magasins religieux, ésotériques 

80% de catholiques, Témoins de Jehova, Mormons, Los Cristianos

La « Catrina », squelette-féminin  ci-dessus est un personnage populaire de la culture mexicaine. Elle est vêtue  de riches habits et porte généralement un chapeau. Il s’agit d’un personnage crée au début du 20° siècle par le caricaturiste José Posada. Et la Catrina est devenue une figure emblématique de la fête des morts mexicaine. Elle a pour fonction de rappeler que les différences de statut social n’ont aucune importance face à la mort. A l’époque, la critique était dirigée contre les femmes d’origine indigène qui méprisaient leur classe sociale et copiaient la mode des critères définis par la société coloniale.

Ici la fête des morts est une fête nationale depuis plus de 3000 ans. Dans la cosmologie mexicaine, la mort n’est pas la fin mais le début d’un voyage!

Nous tombons nez à nez avec une statue de la Mort tenant le globe dans ses mains…elle est assez pertinente, au vue de la situation actuelle avec le coronavirus qui s’immisce dans tous les recoins de la Terre !

 

 

Tortilleria  « boulangerie « mexicaine mécanisée qui fabrique les tortillas

Ces galettes de 20 cm de diamètre sont faites avec de la farine de maïs. En moyenne les mexicains en consomment 250 g par jour, aliment de base qui accompagne les « frijoles », pâte de haricots rouges , la viande, la salade ….Et ces tortillas peuvent être frites (tacos), fourrées au fromage ( quesadillas), roulées (enchiladas), toastées (tostadas) ou encore en burritos …

 

 

Toujours beaucoup de couleurs

 

 

 

Ruelles

 

 

 

Chiapas de Corso

Nous allons à Chiapa de Corso, à 40 km de San Cristobal, proche de Tuxla, à 500 m d’altitude. On change de climat, ambiance tropicale, il fait très chaud, au moins 40 degrés. L’idée est d’aller voir l’impressionnant Canon d’El Sumidero, avec des parois qui atteignent 1000 m de hauteur…trop tard, nous nous retrouvons avec les bateaux immobilisés pour cause de coronavirus!

Nous en profitons pour faire un tour dans cette petite bourgade coloniale (52 000 habitants). Chaque année, en janvier se déroule la Fiesta Grande en l’honneur de différents saints. La danse des Parachicos et Chiapanecas, dissimulés sous des masques en bois avec des coiffes, châles à rubans et maracas. Deux statues géantes nous accueillent à l’entrée de la ville.

 

Nous nous attardons sur la place, essayons de discuter avec une marchande de glaces, désespérée de ne plus avoir de clients…l’effet du confinement met ces petits vendeurs ambulants en grand danger économique…ils vivent au jour le jour pour survivre…

Nous offrons  des glaces à des enfants assis dans l’herbe pendant que leur maman cherche,elle-aussi désespérément à vendre de l’artisanat. Sa jupe et chemisier traditionnels sont superbement brodés de décors floraux.

 

 

 

 

 

Se désaltérer au Pozol…

Pozol est le nom de la pâte de maïs fermentée, mélangée à l’eau et au cacao. Boisson traditionnelle au Chiapas, très nourrissante ! On boit le Pozol dans des calebasses. Hélène a l’habitude d’en prendre à ce stand tenu par des femmes qui respectent les règles d’hygiène. En principe, rien à craindre côté Tourista!

 

La Cima de Cotorras, un gouffre 

Les paysages en chemin

 

 

Le gouffre

Le site écotouristique est ouvert et nous faisons le tour de cet immense gouffre. Le gardien du site nous partage les secrets de ce lieu  qui recèle  beaucoup de peintures rupestres. Il a parcouru chaque centimètre de ces parois en escalade. Ses découvertes font l’objet d’un livre de toute beauté.

Entre 3 filles, nous partons avec lui observer ces peintures de plus près.  Ces empreintes de mains me rappellent les peintures des aborigènes, à 14000 km d’ici!

 

 

 

Quand le soleil commence à décliner, on peut voir des groupes genre perroquets-perruches tournoyer dans ce gouffre; elles habitent dans le fond qui est recouvert d’une végétation dense. Leur vol est majestueux avec leur plumage vert vif .

 

 

 

 

 

 

 

Recommandation de confinement au Mexique

 

Quedarte à la casa…restez à la maison

Depuis deux jours,  ça y est le gouvernement mexicain a vraiment beaucoup insisté et demande aux gens de rester chez eux confinés. Pour l’instant,  il n’utilise pas de force policière ou armée pour faire respecter cette forte recommandation. Le zocalo, place centrale est fermée de banderoles et certaines rues également: elles sont devenues piétonnes.

 

 

 

Confinement et où allons-nous ?

Hélène et Julio sont d’accord pour que nous restions chez eux, sachant qu’à tout moment nous sommes prêts à prendre une location de notre côté si notre présence devient trop lourde…Leur maison est grande et se situe sur un immense terrain d’un hectare, ce qui nous permet à tous de pouvoir vivre sans être les uns sur les autres! Le cadre est magnifique, au cœur de beaux arbres, avec beaucoup de fleurs et une magnifique vue sur la ville de San Cristobal au loin qui se profile derrière cette végétation de pins.

 

Un jardin, beaucoup d’arbres fruitiers: citronniers, manguiers, pêchers, pommiers…Il y a également quelques maisonnettes destinées à la location Airbnb, perchées sur les contreforts de la montagne …une grande salle de sport…de quoi s’isoler si on ne se supporte plus !

 

Et de magnifiques oiseaux et écureuils ! J’allais oublier le ballet des colibris qui butinent le nectar et battent de leurs ailes de façon impressionnante.

 

Une super adresse que l’on vous recommande vivement si vous séjournez à San Cristobal. Un lieu paisible, propice au repos, au yoga, à la méditation, à l’oisiveté!

 

Ensemble, nous avons décidé de suivre les recommandations. Nous ne sommes pas surpris. En France il y a déjà 2 semaines que le confinement a été mis en place. Nous avons déjà eu une chance extraordinaire de pouvoir voyager jusqu’à ce jour, déjà huit mois écoulés de voyage sans encombre. Nous avons vraiment l’impression que les frontières se ferment derrière nous.

Je n’ai pas encore parlé du travail de Julio et Hélène mais vous allez vite comprendre que ce serait complètement absurde de vouloir continuer en tant que blancs plus particulièrement à s’exposer et surtout ou plutôt à prendre le risque de contaminer des personnes et surtout des indigènes, qui ont déjà une santé fragile et des conditions de vie difficiles.

Nous avons fait la connaissance de Julio il y a peu de temps et c’est un homme extraordinaire. Il se définit comme un indigène de l’ethnie sokié c’est-à-dire un Aztèque au grand cœur. Son histoire est fascinante. Nous avons effectivement le temps de faire connaissance puisque maintenant tout le monde se retrouve confiné sur le lieu de Madre Tierra, nom de l’ONG créée par ce couple fantastique. Donc nous sommes cinq avec Gloria, une jeune fille de 23 ans originaire du Guatemala, en formation au sein de Madré Tierra. Je raconterai l’histoire de Gloria plus tard.

L’histoire des peuples racines, indigènes Mayas et Aztèques

On appelle au Mexique indigènes les populations précolombiennes, c’est-à-dire les descendants des Mayas ou des Aztèques qui ont été colonisés par les conquistadors espagnols.

Au 16° siècle, les Espagnols sont donc venus au Mexique conquérir le territoire.  Ils ont utilisé les indigènes, c’est à dire les populations locales,  en tant qu’esclaves. Ces esclaves devaient cultiver les terres des riches propriétaires terriens. L’esclavage a duré trois siècles. Puis il y a eu au XXe siècle une forme de libération de ses esclaves.Ils retrouvaient enfin le droit d’être des êtres humains. Mais comme ils n’avaient reçu aucune éducation,  aucune culture,  ils n’avaient pas d’autre issue que de rester travailler chez ces mêmes propriétaires terriens. Ces derniers ont commencé à les rémunérer avec une monnaie qui ne pouvait être dépensée que localement. Et ils étaient très peu indemnisés. Leur vie n’a pas vraiment changé, ils pouvaient au moins changer de patron s’ils ne s’entendaient pas avec lui ou s’ils le trouvaient trop violent.

 

Incroyable soumission qui perdure …

Dans la ville de Saint Cristobal, jusque dans les années 1980 -1985,  les indigènes n’avaient pas le droit de marcher sur les trottoirs, ils devaient marcher dans la rue, sur la chaussée. Et si d’aventure, ils croisaient un blanc, ils baissaient même la tête en forme de soumission.

L’Eglise a joué un rôle important et incroyablement dévastateur auprès de ces populations. L’Espagne a utilisé la religion catholique pour soumettre tous les indigènes à la cause du propriétaire terrien espagnol. La religion a apporté le culte d’une vierge basanée pour inviter les indigènes à lutter sans armes contre les espagnols. La religion catholique leur a été vraiment présentée avec un dieu qui observe chaque personne dans tous ses gestes et qui punit. Donc toutes les actions des indigènes devaient suivre les recommandations des prêtres blancs. Au point même que les indigènes voyaient dans les «têtes blondes»  une forme de dieu. La religion leur assurait qu’ils iraient au paradis, puisqu’ils étaient pauvres. 

Les indigènes Mayas et aztèques respectent la parole des prêtres et n’imaginent pas un instant les contredire. Ce qui explique cette soumission qui a entraîné une perte de confiance en soi, un manque de reconnaissance personnelle.

 

 

Théologie de la libération

 

Dans les années 70, Samuel Ruiz, évêque du Chiapas s’implique dans la mise en œuvre de la Théologie de la Libération et se révèle être un défenseur des droits des peuples indigènes du Mexique. Il témoigne qu’en arrivant au Chiapas en 1960, il a été frappé par le dépouillement des indigènes et le mépris dont ils étaient victimes. Ils étaient la propriété des riches propriétaires fonciers et étaient vendus comme le bétail. L’évangélisation du Mexique lors de la conquête hispanique a confondu foi et culture. Et la culture précolombienne a été écrasée par la culture occidentale. Cet évêque s’est énormément mobilisé contre cette pauvreté qui résulte d ‘une situation structurelle. Il sera médiateur lors du conflit entre l’armée zapatiste et le gouvernement mexicain.

 

Extrême pauvreté des peuples indigènes

Aujourd’hui encore nombreux mayas et aztèques descendants vivent dans des conditions d’extrême pauvreté. Ils ne représentent qu’1 % de la population mexicaine. L’Etat Mexicain ne se préoccupe pas de ces minorités, qui habitent pour la plupart dans le Chiapas où il n’y a jamais eu de réforme agraire avec redistribution des terres, comme cela s’est fait dans le reste du pays. Ici la pauvreté est préoccupante, 77% des habitants sont considérés comme pauvres voire d’extrêmement pauvres pour un tiers. Un quart souffre de malnutrition, il y a encore 15% d’analphabètes et 10% habitent encore dans des maisons au sol en terre battue.

Le mouvement zapatiste : « TIERRA y LIBERTAD » (Terre et liberté)

 

Beaucoup d’associations, ONG se sont installées à San Cristobal pour venir en aide à ces populations extrêmement défavorisées qui vivent, pour certains,  dans des conditions très voisines de ce que l’on peut retrouver en Afrique subsaharienne. Dans les années 1980-90, le mouvement Zapatiste (EZLN) est né dans l’Etat du Chiapas, pour leur venir en aide. Il s’agit d’un mouvement social qui vise à aider les indigènes à récupérer leurs propres terres pour leur permettre de cultiver et de survivre grâce à leur production. Ce mouvement zapatiste a connu et connait encore une très forte résonance en Europe dans les mouvements altermondialistes.

Le nom zapatiste a été donné en référence à  Émiliano Zapato, chef de la révolte paysanne du Mexique en 1910: héros révolutionnaire avec ses longues moustaches et son chapeau. En 1910,  les chiffres sont incroyables : 820 propriétaires possédaient 95% des terres cultivables. Cela a aboutit à une réforme agraire pour redistribuer la terre aux petits paysans, mis malheureusement pas dans la région du Chiapas.

Quand le mouvement zapatiste est né, il faut savoir que les indigènes vivaient toujours dans des conditions féodales sans réforme agraire; ils travaillaient pour un propriétaire terrien mais ne pouvaient en aucun cas acquérir quelques terres pour eux-mêmes.

Le mouvement zapatiste était un mouvement pacifique au départ, qui a formé des personnes qu’on appelle des campagneros , c’est-à-dire des personnes issues de ses communautés qui ont eu envie que les choses changent.

 

Le 1° janvier 1994, le Mexique rejoint officiellement le grand marché de l’Amérique du Nord. Ce qui signifie à terme la fin de l’agriculture paysanne mexicaine qui ne peut rivaliser avec les gigantesques étendues mécanisées des plaines américaines. Les paysans indiens du Chiapas prennent les armes et se soulèvent, avec à leur tête le commandant Marcos. Tous portent un passe-montagne noir ou un foulard avec une étoile rouge, symbole de la résistance. Le gouvernement a alors déclenché une contre-offensive qui a fait des centaines de morts. Des accords ont été signés mais rien ne s’est concrétisé. Il y a eu très peu de terres redistribuées et quand cela a été le cas, il s’agissait souvent d’une terre peu fertile sur les hauteurs des montagnes. Les paysans aiment dire «  les paysans habitent au sommet des montagnes et les vaches dans les zones vertes et humides » , comme si les vaches avaient davantage de privilèges que les humains.

A ce jour, la lutte continue…

En 2001, l’Etat a bien voté une loi reconnaissant L’EXISTENCE LÉGALE des indiens mais concrètement aucune mesure pour leur donner le droit à la terre, au logement, au travail, à la santé, à l’éducation, à la reconnaissance de leur culture en tant que peuple indigène n’a vu le jour. Le tissu militant reste actif à travers le mouvement zapatiste qui dispose d’un impact médiatique puissant au niveau  international, soutenu par des personnalités du monde altermondialiste comme José Bové. Ils refusent tout compromis avec le gouvernement. Ils ont créé leurs propres écoles, dispensaires.

D’autres organisations sociales sont nées du mouvement zapatiste. Leurs dirigeants viennent  effectivement du mouvement zapatiste et ont créé des mouvements sociaux indépendants comme  l‘Opez, l’Ocez, le Mocri…Ils luttent en faisant pression auprès du gouvernement pour faire reconnaître leurs droits à la terre, à un toit, à l’éducation, à la santé, à la souveraineté alimentaire.

Nous irons à leur rencontre pour comprendre les enjeux des communautés sur le terrain.

Le climat est toujours tendu et des groupes paramilitaires, protégés par la police recherchent les responsables de ces organisations qui se retrouvent régulièrement en prison et pire pour certains disparaissent. Ci dessous un petit autel de dirigeants ayant été éliminés.

 

 

Et les ressources du Chiapas?

Le Chiapas produit du café, du maïs, élève du bétail,  possède quelques gisements de pétrole et gaz et fournit près de la moitié de l’électricité mexicaine grâce aux barrages. Mais les gouverneurs du Chiapas et l’Etat mexicain ont toujours donné la priorité aux  grands propriétaires, éleveurs et exploitants de bois, au détriment  des populations indigènes.

Les paysans essaient de survivre avec la culture de piment, patate douce, haricots rouges et surtout maïs. Certains travaillent dans des plantations de canne à sucre et café pour avoir un complément de revenus pour survivre.

Aujourd’hui c’est principalement du maïs américain qui compose les tortillas, aliment de base. Et c’est cet accord de libre échange aux conséquences catastrophiques qui pousse des milliers de paysans à l’émigration clandestine aux Etats-Unis pour espérer y trouver un travail.

 

 

Dans le prochain article, nous vous partagerons la réalité de ces populations indigènes Mayas. Madre Tierra, l’ONG de Julio et Héléne nous a permis d’aller à leur rencontre et cela nous a ouvert les yeux sur un pan du Mexique en 2020…

 

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