Immersion au coeur de l’école de Tablao

Nous sommes revenues passer plusieurs jours à l’école de Tablao. Catherine souhaitait être présente pour accompagner l’utilisation de matériel scolaire apporté dans les valises comme les livres, crayons de couleur et certains jeux pédagogiques. Cela a permis également de faire découvrir ce que les élèves de Schaffhouse (Alsace) avaient préparé pour leurs amis togolais.

Séjourner au coeur du village est un bon moyen de plonger dans le quotidien des élèves et de tisser des liens durables avec les enseignants et les élèves. 

Logées au village

Une famille nous héberge chez elle, à 2 pas de l’école. Nous avons apporté des matelas de mousse, ainsi qu’une moustiquaire et nous avons pu dormir dans une petite pièce au toit en tôle. Le coin-douche en plein air se résume à un espace dissimulé par un drap où on peut se laver à l’aide d’une cruche et d’un seau. Fort heureusement, l’enseignante volontaire (maîtresse des CE1-CE2), qui habite dans cette maisonnée nous apporte gentiment chaque jour une bassine de 20 litres d’eau, qu’elle va chercher à 200 m au forage …Elle la porte sur sa tête avec une telle élégance, alors que nous, européennes, sommes incapables de déplacer cette bassine !  

Le chef de famille plutôt âgé, vit avec 2 femmes et a 14 enfants déjà adultes. Seul les garçons sont restés vivre là et nous avons fait connaissance de deux jeunes épouses. Les échanges étaient intéressants autour de leur vision de la France, de la cuisine, de leurs aspirations. Toutes les deux sont de jeunes mamans de moins de 22 ans. Une des bébés qui a 10 mois marche déjà toute seule et trottine derrière les poules…Il faut que nous soyons vigilantes car ces dernières n’hésitent pas à entrer dans la chambre et y laisser au passage leurs fientes!

Pour la cuisine, nous avons apporté nos vivres et le directeur de l’école qui loge de temps à autre dans une des pièces voisines, nous a prété son butagaz. Fort heureusement, car on aurait été bien embarrassé pour utiliser le foyer de cuisson familial à bois pour cuire nos pâtes. Un soir, la famille nous a même proposé du foufou à la sauce arachide bien pimentée! 

Belles parties de rires autour du jeu « Crazy cups » qu’on avait apporté dans nos bagages

Observations dans les classes

La vidéo ci-dessous illustre le fonctionnement de l’école au Togo, dans les 3 classes d’école élémentaire et dans la classe de maternelle.

Il y a 3 classes : une classe de CP1-CP2 avec l’enseignant, M Kodjo Bouyo , la classe de CM1-CM2 avec le directeur M Togo Lindou, et la classe de CE1-CE2 avec une enseignante volontaire Mme Yvette Agama.

Depuis l’inauguration de l’école, une classe maternelle a vu le jour en accueillant des enfants entre 3 et 5 ans. L’enseignante volontaire Mme Solange Adjabo accueille les élèves dans un apatam qui servait de classe avant la construction de la nouvelle école.Il s’agit d’une petite pièce en terre battue avec un toit de tôle, délimité par des murets où s’assoit une trentaine d’élèves. Il n’y a pas de porte.

Enseignante volontaire?

Le Togo manque cruellement d’enseignants. A Tablao, deux femmes prennent en charge deux classes d’élèves mais n’ont pas encore réussi le concours d’enseignants. Elles apprennent auprès de leurs collègues titularisés. Mais cette situation peut durer plusieurs années car l’Etat ouvre très peu de postes chaque année. Ces femmes sont extraordinaires car elles n’ont aucune rémunération et s’engagent auprès de ces élèves à temps plein, convaincues du rôle de l’école pour aider cette jeunesse à sortir de leur misère.

Non seulement, elles ne sont pas rémunérées, mais elles ne disposent d’aucune aide matérielle. Nous avons pu observer comment la maîtresse de maternelle canalisait la classe de jeunes élèves de 3 à 5 ans. L’apprentissage se fait à travers des comptines et chants en français. Ces enfants découvrent le français à l’école car à la maison, la famille parle la langue de leur ethnie, généralement le kabyé dans la région de La Kara. Il est certain que ces élèves arriveront plus « armés » au CP1, année où ils vont débuter l’apprentissage de la lecture. J’ai pu effectivement constater comment les actuels enfants du CM1-CM2 avaient beaucoup de mal à s’exprimer et comprendre en français les consignes. Eux ne sont jamais allés en maternelle.

Enseigner avec un bébé sur le dos et un autre de 2 ans ….Impressionnant!

La maîtresse de maternelle ne peut compter que sur elle-même pour enseigner et surveiller ses 2 enfants dont un bébé qu’elle doit régulièrement allaiter…

Echanges virtuels entre écoliers français et togolais

Les écoliers de Schaffhouse (Alsace) avaient préparé des chants, des dessins et une histoire qu’ils avaient enregistrée avant que nous ne nous envolions pour le Togo. Les élèves de Tablao ont découvert tout cela, les yeux fascinés. Et à leur tour, ils ont voulu apprendre le chant français « On est tous pareils » et ont dessiné leur environnement : cf. Vidéo ci-dessous.

Fabriquer une étagère pour stocker les livres, tout un projet…

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Durant notre séjour, nous avons fait réaliser une étagère en bois pour entreposer les livres et matériel apportés dans nos bagages. Pour ce faire, il a d’abord fallu trouver 2 menuisiers des environs, leur remettre de l’argent pour l’achat de planches et clous. Et ils ont passé 2 jours à construire l’étagère, équipés d’un petit rabot, marteau et petite scie pour mettre en forme cette étagère de 2 m*2 m. Quelle aventure quand il s’est agit de la transporter dans le bureau du directeur: bâtie en bois d’acajou, elle s’est révélée extrêmement lourde. Tous les élèves ont participé à cette manipulation et il a fallu développer beaucoup d’ingéniosité pour la faire passer dans la porte. On est loin du concept ikéa !

Expérience très enrichissante

Faire découvrir aux écoliers de Tablao les albums apportés, les accompagner dans leurs découvertes, échanger avec les enseignants, leur apprendre le chant des écoliers de Schaffhouse, les laisser s’exprimer par le dessin, que de situations d’échanges enrichissantes…

Difficile à imaginer pour des occidentaux, mais ces enfants passent leur journée à l’école, avec seulement une ardoise, un petit cahier et un stylo pour tout équipement. La pédagogie togolaise est toujours frontale, les élèves n’ont pas l’habitude d’exprimer leurs propres idées. La langue française ne facilite déjà pas les échanges et la culture ne les sollicite pas. Il s’agit plutôt d’un modèle de répétition. Mais je ressens vraiment qu’un séjour plus long au sein de l’école permettrait d’initier des démarches de projets avec les enseignants qui sont demandeurs et manifestent beaucoup d’intérêt pour des formes de pédagogie différente.

Une première pour les enfants de maternelle!

Quel bonheur de permettre aux jeunes élèves de maternelle de faire de la peinture avec leurs mains !

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