DUKONO, 2° volcan, on adore !

 

Toujours sur l’île Halmahera dans les Moluques du Nord, en Indonésie

Depuis l’ascension du Volcan Ibu,  nous avons eu en réalité juste une nuit complète dans un petit hôtel à Tobelo pour refaire le plein d’énergie…

Aujourd’hui, nous allons partir à la découverte du volcan Dukono. Il est 8h30,  le  réveil se révèle très « raide » après cette ascension de la veille  … je me sens très courbaturée…dans ces moments là,  je ressens la « vieillesse » de mon corps, accélérée par les traitements de chimio surtout et de radiothérapie … mon corps me fait mal partout…et mes articulations se rappellent à moi, à chaque mouvement.  Exercices d’étirements, un peu de yoga pour remettre la mécanique en marche ! J’espère vraiment que le volcan Dukono ne sera pas un 2 ° Ibu. Car je doute d’en avoir la capacité! Mais  d’après nos quelques investigations, Dukono devrait être moins escarpé… nous verrons…En tout cas nos 2 compagnons de voyage, bien que plus jeunes, sont aussi fatigués!

 


Un bon petit dej indonésien à base de riz, nouilles sautées et un œuf dur… 10h30, Alex, notre guide nous embarque avec 3 autres jeunes en scooter en direction de sa maison pour charger le matériel de camping et 3 grosses glacières contenant notre nourriture.


Nous sommes équipés de casque de chantier destinés à nous protéger au pied du volcan et dans un second temps, ils font l’affaire sur le scooter, à défaut d’un vrai casque!


Je fais connaissance de la femme d’Alex, charmante. Elle aussi est enseignante! Décidément, je ne rencontre que des enseignants! En Indonésie, c’est actuellement la période des évaluations et les enfants vont être en vacances très prochainement.

Scooter tout-terrain

A la différence du volcan Ibu, c’est en scooter bien chargés que nous atteignons le sentier de départ. Pas facile pour Francis de tenir la glacière d’une main tout en se tenant sur la moto dans des chemins plutôt délicats!


Après une trentaine de minutes sur la route, nous entamons le hors-piste … Au départ, le chemin ressemblait à un chemin forestier de chez nous , qui traverse par contre de belles cocoteraies, avec des tas de noix de coco rassemblées par ci, par là…


Mais très vite, nous filons à travers d’étroits sentiers peu empruntés. Nos bras et jambes nues accrochent la végétation… nous en sommes quitte pour quelques griffures. Le plus compliqué pour le conducteur reste d’éviter les noix de coco tombées sur le sentier, les branches de palmiers et bananiers au sol … et quand nous traversons des portions de sable de scories noires du volcan, il doit vraiment démontrer ses qualités de bon chauffeur! Le scooter patine, dérape, menace de glisser et de nous faire tomber ! J’ai confiance en mon jeune pilote qui se débrouille fort heureusement très bien. Mais intérieurement, je ne suis quand même pas très rassurée…déjà en temps ordinaire sur une route normale mais dans ces conditions!


Il y a quelques passages qui grimpent trop pour que l’engin puisse les franchir, on laisse alors la monture seule avec son conducteur et on marche … nous nous échauffons pour l’ascension qui nous attend .. nous sentons déjà nos muscles de nos cuisses qui font mal  … Francis commence à transpirer à grosses gouttes … il est midi , il fait très chaud dans les plantations, pas de courant d’air!

Nous imaginons comment nos garçons seraient heureux de faire du scooter tout-terrain !

 

13h30 nous nous élançons…nous n’osons pas poser de questions sur la durée et la difficultés du trek.. nous préférons nous laisser surprendre … Alex annonce que nous traverserons 10 rivières à sec (la saison des pluies n’a pas encore débuté) avant d’atteindre la caldeira du volcan. Au moins, on a un repère !

 

Pause pique-nique dans un lit de rivière asséché: riz avec soupe de légumes et œuf frit, le tout préparé par sa femme. Un délicieux ananas très sucré clôture ce bon repas.

Puis nous reprenons notre ascension. Végétation très différente de celle d’Ibu. Nous sommes dans la jungle primaire et les grands arbres n’arrivent pas à pousser en raison des couches de cendres qui tapissent régulièrement tout ce qui émerge aux alentours !  Jusqu’à 700 m d’altitude environ, les bananiers, ficus, arbres divers dont je ne connais pas le nom sont encore assez hauts.

Nous sommes enveloppés par des fougères arborescentes et d’autres grandes plantes qui nous enveloppent …nous ne distinguons pas vraiment le ciel, tellement c’est dru… parfois on se faufile dans des goulets hyper étroits et on progresse tels des spidersmen et spider women en se servant de nos mains pour escalader les rochers … nous sommes vite noirs…tout est recouvert de cendres volcaniques …le sol, les rochers, les troncs, les feuilles …et comme nous transpirons énormément, la cendre d’accroche bien! Impressionnant et même si on essaie de se nettoyer dans les quelques flaques d’eau du lit de certaines rivières… cela ne dure pas longtemps ! Pire qu’au volcan Ibu. Quand il pleut, je n’ose même pas imaginer l’allure du trekking car ces goulets se rempliraient d’eau …


Théoriquement, décembre correspond au début de la saison des pluies mais elle a du retard … tant mieux pour nous car je crois que nous serions transformés en ramoneurs !

 

Volcan en vue

On émerge enfin de cette jungle et notre regard peut embrasser un superbe panorama depuis la mer des Molluques jusqu’aux lèvres du cratère du volcan. On y est presque et c’est vrai que la montée était moins raide qu’hier … tant mieux car nous avions tous laissé des plumes à l’ascension du Volcan Ibu! En tout cas, nos mains sont noires de cendres, tout comme le reste du corps, j’imagine…Vive les lingettes de bébé !


Après 4h d’ascension, nous arrivons à la caldeira du volcan, une zone sablonneuse dégagée, désertique, qui présente un côté désolant par ses tonalités grises de cendres…le vent balaie cette sorte de plateforme et nous envoie un bon bol de poussières noires! Histoire de parfaire notre maquillage. De l’autre côté, se trouve un plateau de roches volcaniques…certaines sonnent le creux, elles ont emprisonné des poches de gaz lors de leur formation.

Une source prend forme pas très loin, une belle mare aux eaux turquoises nous permet de se laver au moins les jambes !


Nous installons le camp sur cette sorte de plate-forme rocheuse. Nous sommes à 900 m… nous grimperons le reste dans la nuit à 3h du matin.. impossible selon notre guide de planter la tente près du cratère, trop dangereux en raison des jets de pierres fréquents.

 


Nous sommes un peu déçus car on avait imaginé pouvoir observer toute la nuit l’activité volcanique … Depuis notre tente, nous distinguons  les énormes volutes noires qui s’échappent à chaque grondement du cratère mais la brume commence à envelopper le camp! Un bon repas chaud de nouilles, légumes et œuf et nous essayons de dormir…il n’est que 19h30… pas évident! 


Moins de bruits d’animaux que sur les flancs du Ibu mais néanmoins quelques oiseaux et sifflements de cigales entre les détonations permanentes du volcan. A la différence de Ibu, le Dukono est constamment en activité et crache ses bombes volcaniques sans relâche d’où un grondement permanent. Francis est fâché après notre tente qui ne ferme plus, la fermeture ayant rendu l’âme …le vent souffle, il ne fait effectivement pas très chaud et on n’est pas équipé en fonction …le sol est moins dur qu’il y a 2 nuits, on s’habitue à dormir à la dure, juste glissés tout habillés dans notre drap de soie blanc sur le sol … il fait nuit, on ne verra pas la saleté ! Nous nous endormons baignés par le ronronnement volcanique qui ressemble étrangement à une mer agitée bretonne ou à un gros torrent alpin…

Ascension du volcan dans le brouillard et la nuit

2h30 … debout, le brouillard bouche la vue sur le Dukono. Alex nous explique que cela ne va pas être facile de se diriger dans cette mer de rochers … Par temps clair, le panache de fumée libérée par le Ducono, ainsi que les étoiles servent de guides pour s’orienter. C’est son expérience du terrain qui va nous aider à approcher le volcan

La nuit a été très mauvaise pour Francis qui est transi de froid .. j’avais prévu un collant de laine qui m’a bien aidée. Et j’ai trouvé une solution, glisser les pieds à l’intérieur de mon sac à dos, ce qui m’a réchauffée  … mais le vent pénétrant librement dans la tente ne nous a pas aidés ! Et sans sac de couchage, un drap de soie est une bien piètre consolation!  Cela m’a rappelé mes  premières expériences de camping, ado … Equipés sommairement, les nuits étaient parfois très froides. Avant de démarrer l’ascension des 500 derniers mètres, Alex nous propose un thé pour nous réchauffer.

Pas à pas à la lampe frontale

On suit Alex pas à pas, lampe frontale à l’appui …au départ nous marchons et grimpons sur des rochers bien durs, avec des passages dans des endroits très sablonneux voire marécageux … petites flaques coincées entre les pierres. Puis la roche devient plus friable, en fait il s’agit de cendres transformées en roches mais toutes « jeunettes » .. il y a peut être une année seulement …


Nous franchissons des crêtes sombres dans cette nuit d’encre… laissant espérer à chaque fois que nous avons atteint le cratère…

… en vain et pourtant le grondement devient de plus en plus fort. Dukono ne s’accorde que 20 secondes de répit entre chaque détonation…une vraie cocotte minute…

Au pied du chaudron

4h30, notre progression s’arrête. Nous levons les yeux et devant nous, Dukono nous présente toute sa majesté … enfin ce qu’on peut en deviner dans la nuit! Chacun essaie de trouver un appui, car nous sommes les pieds dans les scories, sable noir légèrement tassé mais qui glisse sous nos chaussures. Nous sommes sur les lèvres du cratère. Pas facile de trouver une stabilité, les abords sont pentus et tout ce qu’on touche s’effrite. Avec nos pieds nous essayons de créer une petite surface plane. Nous enfilons des vêtements chauds car nous sommes en sueur mais dès que l’on s’arrête, le vent est frais. Mon sac à dos roule en contrebas… heureusement pas trop loin et pas côté cratère!


Je m’installe cramponnée à ce bord qui surplombe le cratère pour essayer de poser l’appareil photo… pas facile du tout , je ne vois pas grand chose et le matériel souffre dans cette poussière. 

Souffle de vulcain issu des profondeurs de la  terre-mère

Comme sur le volcan ibu, nous sommes seuls sur les flancs du Dukono, aux premières loges d’un spectacle incessant. Pas évident à décrire tellement la scène paraît surnaturelle…


Un bruit sourd monte des entrailles et ce bruit s’amplifie, le sol gronde, tremble, nous sentons, ressentons les vibrations dans nos pieds. Elles traversent notre corps, nous nous sentons partie intégrante du cratère du volcan… et au fond du cratère, à 150 mètres environ jaillissent des morceaux de lave incandescente rouge. Ils peuvent être projetés très haut dans le ciel ou rester plus au fond du cratère. La Terre crache ses entrailles par une bouche de seulement 5 mètres de diamètre mais quel raffut, supersonique,  quel show… un vrai feu d’artifice, d’ailleurs je m’interroge sur le fait de savoir si l’homme a créé les feux d’artifice en s’inspirant des explosions des volcans?! A creuser ! 
Alex nous a conduits au sud du cratère, le vent éloignant ainsi toutes les projections et fumées sur la partie nord du volcan.

Casques sur nos têtes, nous veillons d’un œil malgré tout à la direction des projectiles. L’activité d’un volcan n’est pas toujours prévisible!  Le jour se lève mais le soleil est très voilé par des nappes de brouillard. Rien à voir avec le lever de soleil sur le mont Ibu.

 


Nous découvrons la géographie du volcan, une bouche béante noire de 800 m de diamètre. Avec la lumière disparaît la visibilité des jets de lave. Nous nous concentrons sur les énormes panaches de gaz aux tonalités grises, noires, blanches qui s’élèvent en une immense colonne dans le ciel.

Se résoudre à quitter ce spectacle fascinant…

7h30, il faut se résoudre à quitter la salle de spectacle …de toute façon le brouillard semble s’emparer de la scène. Il nous reste encore les impressionnants grondements ! Nous sommes tous bouche-bée devant une telle « rage » volcanique.

Nous entamons la redescente sur les riches friables quand je remarque que le volcan a arrêté son grondement depuis plusieurs minutes. Fait inédit depuis notre arrivée où son rugissement pouvait s’entendre jusqu’au camp! Et tout à coup, Alex s’écrie “be careful” «  Attention », bruit d’une énorme déflagration avec projection de pierres dans notre direction… elles tomberont plus haut … Alex explique qu’il faut s’éloigner car cela peut se reproduire et cela peut être très dangereux! Ça remet les pendules à l’heure .. ce n’est pas une vulgaire montagne qui crachote mais bien un volcan en pleine activité.

Et la sécurité lors de ces treks sur les volcans?

Le niveau d’activité de Dukono est actuellement de 2 sur 4 et sa dernière grosse éruption date de 1934. En réalité, il faut compter sur soi-même, emporter une trousse de premiers secours (nous l’avions laissée à l’hôtel, toujours utile!) et faire confiance à sa bonne  étoile pour qu’il n’y ait pas d’accident! Car pas d’hélico dans ces zones, des hôpitaux lointains et de toute façon, pas de réseau pour communiquer! Finalement le plus important est de ne pas y penser pour savourer au mieux Dame Nature dans ses entrailles !

 

Nous quittons les entrailles de Dame Nature…

Retour au camp pour le petit déjeuner, Dukono a la tête dans les nuages mais les pieds au soleil. Nous traversons l’ancienne caldeira recouverte de cendres, paysage lunaire avec des petites pousses vertes qui pointent …avec le temps, la jungle reprendra possession de ses territoires!



Depuis la caldeira, nous prenons encore le temps de regarder ce volcan DUKONO qui crache en permanence ses panaches de fumées, cendres et lave, avec son rugissement! Je crois qu’on pourrait y rester des heures tellement fascinés par cette activité!

Nature luxuriante

La redescente est super agréable dans cette forêt équatoriale. Nous faisons régulièrement des pauses pour admirer cette nature luxuriante, respirer, savourer la beauté de cette jungle envoûtante, boire car même en descendant nous transpirons toujours et bien sur faire des photos !


Nous croisons des types de palmiers aux dessins géométriques surprenants sur l’écorce…


Certains palmiers sont tellement épineux qu’il vaut mieux ne pas s’y frotter, des cactus géants et ses grandes feuilles qui barrent parfois le chemin ! Des champignons orangés et toujours quelques araignées mais pas de gros mille pattes …le sol est tellement jonché de cendres …pas facile pour y survivre !

Francis s’offre le luxe de refaire une partie du sentier en sens inverse car il a oublié un de mes bâtons de rando lors d’un arrêt … quand on aime, on ne compte pas …heureusement pour lui, il n’a pas du remonter jusqu’en haut du volcan!

 

Retour à scooter digne des courses enduro

Mon chauffeur adore être le premier donc il fonce, je serre les dents …ou plutôt les fesses, moi qui ai toujours eu peur de faire de la moto, je suis servie!

Supers descentes cabossées dans la palmeraie de cocotiers…même en VTT, j’irais plus doucement car on retrouve les noix de coco à éviter, les grandes palmes de cocotier au sol, celles de bananiers …autant d’obstacles qui risquent de nous faire chuter. 

Une fois sur la route, bitumée, il engage la course avec son copain … nous arrivons à doubler un camion… et ce n’est pas le casque de vulcanologue qui nous protégera en cas de chute! Nous gagnerons la course virtuelle … première à la douche de décrassage! Je pense qu’elle deviendra une des douches les plus appréciées de notre tour du monde … tellement crasseux !


Nous passons le reste de l’après-midi à faire notre lessive et nettoyer nos sacs, chaussures, drap de soie, étui de l’appareil photo! Je me suis d’ailleurs installée sur un petit tabouret aux côtés des lavandières de l’hôtel à l’arrière du bâtiment près du puit. Plus pratique car plus d’espace,! J’ai laissé la salle de bain de la chambre à Francis. Ambiance sympa avec les femmes qui travaillent pour l’hôtel  !

Nous pouvons nous écrouler enfin sur notre lit ! Grimper 2 volcans à 2 jours d’intervalle avec des nuits presque blanches relève d’une sacrée performance … à la limite de nos capacités physiques… nous n’avons plus 20 ans … un peu de réconfort quand nos petits jeunes suisses s’avouent aussi épuisés ! Je conseillerais  un jour de repos supplémentaire entre les 2 ascensions. Et surtout commencer par le volcan Ibu, Dukono apparaît ainsi plus facile !

La perspective d’aller se reposer 4 nuits sur les îles Bunaken au large de Manado, sur l’île de Sulawesi  nous conforte dans notre choix d’itinéraire!

 

Coordonnées de notre guide Alex

Si l’exploration des volcans Ibu et Dukono vous tente, voici les coordonnées de notre guide Alex : alex_djangu@yahoo    whatsapp 62-821-9123-5467

Quelle expérience inoubliable que d’avoir pu marcher sur ces 2 dômes actifs…étrange sensation de bonheur mais aussi de petitesse face au déchaînement des éléments, face à cette force vive qui jaillit des entrailles de la terre.

Le volcan DUKONO en vidéo avec ses impressionnants grondements

VIDEO A l’assaut du Volcan DUKONO

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2 Comments

  • yolande trinite
    Posted 23 janvier 2020

    Merci pour ce reportage haletant et surtout MERCI à VOTRE BONNE ETOILE ! Vous n’imaginez même pas à quel point elle vous a protégés au regard d’autres aventuriers partis dans leurs rêves à Sumatra et en Nouvelle Zélande il y a peu! Je vous embrasse avec grand soulagement et gratitude envers vos guides!
    Yo

    • @dmin
      Posted 15 février 2020

      Oui Yolande, le lendemain de notre ascension se produisait le drame en Nouvelle Zélande…merci à notre bonne étoile qui nous guide et nous préserve !bises

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